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Voyager en train. Des petites lignes aux chemins de fer de légende
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"Nous aurons tous un grand après-midi à nous". Dans l'ouvrage, qui a pour titre "L'empire du temps", l'auteur nous raconte qu'au XIXe siècle, chaque compagnie de chemin de fer réglait ses trains sur l'heure de son chef-lieu, jusqu'à ce qu'en 1888, l'Etat impose l'heure de Paris à toutes les gares, si bien qu'un voyageur en province pouvait lire trois heures différentes aux cadrans : l'heure locale en ville, celle de Paris dans le hall, et une pendule retardée sur les quais pour éviter les contestations ! Anecdote révélatrice de comment l'avènement du chemin de fer a pu modifier la perception du temps et de l'espace, quand un voyageur, quelques années plus tôt, prenait la route pour quatre à dix jours au lever du soleil. Flaubert entrevoit cette révolution aussitôt qui, de Croisset où il vit, s'enthousiasme comme un voleur à jeun à la perspective de profiter de la ligne Paris-Rouen (ouverte en mai 1843) pour abolir l'espace qui le sépare de Louise Collet : " Tu partirais de Paris à 9 heures du matin, tu serais à Mantes à 10 heures 50 minutes, j'y arriverais à 11 heures 19 minutes. Nous aurons tout un grand après-midi à nous ". Pouvait-il pour autant prévoir l'implication que le chemin de fer aurait sur la vie sociale ? Au-delà des recherches pratiques de synchronisation des horloges dans !espace terrestre - qui devaient mener à la science de la relativité - les financements nécessaires à sa construction : matériel, voies, viaducs, tunnels, gares, faisaient des compagnies exploitantes le temple même de la société du capitalisme, de la colonisation, voire de la guerre, en attendant un jour de l'être du tourisme. Porté sur de tels fonts baptismaux, le chemin de fer devait devenir le lieu, le théâtre, une sorte de modèle accompli de l'affrontement des classes sociales et, par suite, de la comédie humaine. La littérature et le cinéma pouvaient dès lors s'emparer de ces trains crépusculaires, filant jusqu'à l'aube, dans une nuit ponctuée d'arrêts en des gares qui s'annonçaient par la voix impersonnelle d'un haut-parleur ; intriquées, ces deux expressions romanesques allaient trouver, dans le huis clos des voitures emballées sur les rails, la plus puissante matière à raconter les errements de l'humanité : cheminots, amants, aventuriers, espions, policiers, anarchistes, mais aussi tortionnaires, résistants, diplomates, justes, inconnus... Il n'est pas jusqu'à la peinture, spécialement impressionniste, qui n'ait été fascinée par les trains au point d'en rendre mouvantes les approches aux aiguillages, les manoeuvres noyées dans les fumées, les passages sur viaducs, avant même que les futuristes en idolâtrent la vitesse et que les affichistes nous en brandissent la propriété première, claquante comme une oriflamme: "EXACTITUDE". Mais qu'est-ce qui suscite une telle exceptionnelle passion pour qu'une machine, la Lison de Lantier dans Zola, devienne "la Bête humaine" ? Est-ce une apparence anthropomorphe qui laisse percevoir un oeil cyclopéen, un mufle, des muscles, un souffle ? Ou les odeurs de fumée et de fer chaud ? Ou le battement de roues sur les rails qui scandent la vitesse ? Nous sommes allés pour ce numéro exceptionnel ausculter les diverses versions de cette passion des trains qui, économie de moyens faisant loi, revient en force dans nos vies. Sommaire. Fabrice Del Taglia, directeur général de Nomade Aventure : "Nos voyages en train génèrent 50 fois moins de CO2 qu'avec l'avion". Où en est l'Orient-Express ? Trains de nuit, les aubes inattendues. 13 trains d'ici & d'ailleurs pour (vraiment) embarquer. Rovos Rail, voyage dans le temps. Les trains de montagne, une passion suisse. Les (deux) trains du désert. Nice-Tende, le train des merveilles. La grande épopée du Transsibérien.
Voir le numéro de la revue «Grands reportages, 521, 01/12/2023»
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